Troisième tour

     Après avoir pris la tête au premier tour et gagné au second, Nicolas Leudière, nouveau maire de Sablé, n'aura pas gagné le troisième : l'élection du président de la communauté de communes. Un de ses partisans considère sur Internet qu'il a été victime de magouilles ; il se trompe car la candidature de l'ancien colistier de Marc Joulaud souffrait de nombreux handicaps. La seule (petite) surprise est l'ampleur de la défaite : Nicolas Leudière n'a obtenu que 16 voix contre 28 au vainqueur, Daniel Chevalier, maire de Juigné. 

     La première raison de l'échec de Nicolas Leudière est son manque d'expérience. Il n'a jamais siégé à la communauté de communes pour la simple raison qu'il était salarié de cette collectivité. Il ne connaît pas bien les rouages de cette collectivité et ses élus sortants (et, également, les élus nouveaux). Un seul membre de sa liste a déjà été conseiller communautaire mais il faisait partie de l'opposition sabolienne et, de plus, il ne semble pas être beaucoup intervenu ; de toute façon, il n'est pas élu à la CdC.

     Son élection tardive (le 28 juin seulement) est un autre handicap. Dans 15 communes sur 17, les conseils municipaux ont été élus dès le 15 mars (il s'agissait, le plus souvent, d'une liste unique). Dans 10 communes sur 17, les maires sont les mêmes qu'en 2014 ; il faut y ajouter de nouveaux maires qui étaient déjà des élus avant 2020. Bref : tous ces gens se connaissent et, d'ailleurs, ils ont eu l'occasion de se rencontrer lors d'une réunion de la communauté de communes tenue avant le 28 juin et, bien évidemment, en d'autres occasions. Ce qui permet de discuter et de préparer un organigramme qui satisfasse le plus grand nombre. Quand Nicolas Leudière a été élu maire, il est fort probable que les jeux étaient faits. 

     Curieusement, le programme de "Sablé 2020" ne comportait pas une ligne concernant l'intercommunalité. C'est embêtant pour une équipe qui sollicite ensuite la première place de la communauté de communes. Si on se met à la place des autres élus communautaires, on se demande, non seulement, qui est ce candidat au poste de président mais, aussi, ce qu'il veut faire s'il est élu. Le discours de présentation de sa candidature n'a pas dissipé les interrogations.

     Inversement, Daniel Chevalier est vice-président de la CdC et il a été très actif dans son domaine : la culture (il faut dire que l'adjointe sabolienne était très peu présente). Il est connu de ses collègues et semble avoir peu d'ennemis. Il était donc beaucoup plus consensuel. 

     D'autant que Nicolas Leudière s'est fait des ennemis en lâchant Marc Joulaud pour faire cavalier seul et profiter du rejet du poulain de Fillon pour s'imposer. Des amis de François Fillon et Marc Joulaud, souvent membres du parti Les Républicains voulaient venger Marc Joulaud.

     L'élection de Daniel Chevalier correspond, enfin, à une volonté de rééquilibrage de la CdC. Les 28 élus non saboliens ont voulu profiter de l'occasion pour réduire Sablé à son 1/17 d'influence pour paraphraser la formule des Girondins. Ils ont signifié que tout projet sabolien devant être financé par la CdC serait désormais scruté avec la plus grande attention. En définitive, ils voudront éviter que l'intercommunalité serve plus à la ville centre qu'aux autres communes. Le virage est, d'ailleurs, brutal. En effet, de 2014 à 2020, l'exécutif était composé d'un président, sabolien, en la personne de Marc Joulaud et de 10 vice-présidents dont 2 élus de Sablé (soit 11 élus dont 3 Saboliens) flanqué d'un "bureau des Maires" associant à cet exécutif les 9 maires non représentés dans celui-ci. Désormais, on a un exécutif quasi collégial, composé des 17 maires dont le président, les vice-présidents et des conseillers délégués ; on a octroyé un lot de consolation à Nicolas Leudière en le choisissant pour la première vice-présidence mais cela ne doit pas faire illusion. Si on compare avec la CdC du Pays Fléchois, on constate que la commune centre y a obtenu pas moins de 6 postes sur 15 dans l'exécutif (plus que dans le mandat précédent). Autres lieux, autres moeurs.

     Plusieurs questions se posent qui resteront sans doute sans réponse du fait du vote secret. 

          - 1° Qui sont les 4 élus non saboliens qui ont voté pour Nicolas Leudière ? Et pourquoi ? Des adversaires de Daniel Chevalier ? Des alliés du nouveau maire ? Des déçus du partage des responsabilités ? Des élus de gauche voulant s'opposer au maintien de l'emprise de la droite "classique" ?

          - 2° Comment expliquer la répartition inégale des blancs et nuls pour l'élection des vice-président(e)s ? En effet, la maire de Pincé a quasiment fait l'unanimité avec 43 voix sur 44. Sur le podium, elle est suivie par la maire de Souvigné et le maire d'Auvers. Tous les 3 sont des nouveaux. Inversement, le maire de Bouessay n'en a eu que 29. Il est suivi dans la méfiance par 4 autres maires qui n'obtiennent que de 31 à 33 voix ; or, ces 5 là sont tous des élus sortants. Les autres ont entre 38 et 40 voix ce qui montre que, sauf rarissimes exceptions, il y a un groupe d'au moins 4 élus qui refuse les candidats proposés. Sont-ce les mêmes ? En tout cas, on voit bien que la personnalité des élus a beaucoup joué et qu'il vaut mieux être "neuf" ou consensuel pour être apprécié. 

     Question subsidiaire. Est-ce que Daniel Chevalier va démissionner de son poste de conseiller départemental où il a été élu comme divers droite en binôme avec Martine Crnkovic ? 

     Et maintenant ? Le nouveau président étant de droite comme on vient de le voir (même si sa liste municipale comporte des élus censés être de gauche), je suis, a priori, sceptique mais je jugerai sur pièces. En tout cas, la vie politique à Sablé et dans sa CdC est de plus en plus animée.