La plupart de ceux qui me lisent et habitent en Sarthe ont entendu parler de cette affaire. La PDG de l'entreprise débarquée par les actionnaires majoritaires : des fonds d'investissement.
Petit retour en arrière. En 1981, Marc Éttienne crée cette entreprise, à Brûlon, avec quelques amis. 33 ans plus tard, cette entreprise de menuiserie industrielle est prospère et emploie 650 salariés dont 450 à Brulon. En 2003, le PDG-fondateur revend 60% de ses parts à un fonds d'investissement qui, fusionnant avec un autre et étant rejoint par 2 autres, forment un groupe majoritaire qui aujourd'hui contrôle 70% des parts contre 28% à Marc Éttienne. Celui-ci se trouvant en désaccord avec les autres actionnaires, il est débarqué de la holding et la PDG qu'il avait nommée est remplacée par un nouveau PDG. D'après Marc Éttienne et Cécile Sanz, c'est leur refus de cautionner un emprunt de 200 millions pour engraisser les actionnaires qui serait à l'origine du coup d'état.
Pour les informations financières voir les deux excellents articles de Laurent Mauduit dans Médiapart de ces derniers jours.
Jusque-là, rien de bien nouveau sous le soleil : des fonds vautours qui tentent de se payer sur la bête et semblent prêts à sacrifier l'avenir d'une PME dynamique.
Sauf qu'il y a eu un grain de sable. Les salariés de FPEE ont senti le danger et ont décidé de se mobiliser pour contrer ce coup de force. Avec un mot d'ordre qui peut paraître étrange : la réintégration du fondateur et de la PDG. Encore plus étonnant : ils ont été rejoints par les clients de l'entreprise.
La mobilisation a payé. Après une table ronde promue par le ministre de l'Agriculture ! (mais député par procuration de la circonscription), les actionnaires ont accepté de renoncer à la destitution et de céder leurs parts au fondateur et aux cadres. Il ne semble pas, cependant, que les représentants des salariés y aient été associés
La morale de l'histoire : les salariés commencent à comprendre la logique du capitalisme financier et trouvent les moyens de s'y opposer. On leur souhaite d'avoir réussi à préserver leurs emplois. Cet exemple devrait faire tache d'huile. C'est une bonne nouvelle.
On voudrait, cependant, en savoir plus.
- A quel prix les salariés et le fondateur vont-ils racheter leur part ? Sachant que la presse évoque un rachat à un prix élevé.
- Quelles ont été les sommes gagnées par le fondateur quand il a vendu la majorité des parts en 2003 et quand il a participé (en 2011) à une opération financière ? Va-t-il réinvestir ces fonds dans l'entreprise ?
- Qui va financer ce rachat ? Il ne faudrait pas que cela affaiblisse la capacité financière de l'entreprise.
Les salariés ont gagné la manche de la préservation de leur entreprise. Il ne faut pas s'arrêter en aussi bon chemin. Il serait intéressant de mettre tous les comptes sur la table. Et on peut rêver : une loi Macron bis qui régulerait la finance.