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27 septembre 2017 3 27 /09 /septembre /2017 17:09

     Devant nous rendre au Québec cette année, nous avons été alléchés par l'annonce de la gratuité des parcs Nationaux en 2017 à l'occasion des 150 ans de la Confédération Canadienne. Il restait un petit doute concernant les formalités à accomplir puisque le site officiel suggérait de commander une carte d'accès (gratuite bien sûr). 

 

     En réalité, c'était doublement inexact : 

 

          1° Il n'y avait pas besoin de carte d'entrée, du moins dans le parc national de Forillon où nous nous sommes rendus. Sur une route d'accès à l'intérieur du parc, il y avait seulement une barrière que la préposée levait à chaque passage de voiture sans autre espèce de procès. Pour le site historique national de la Pointe au Père, c'était plus complexe : la visite du phare était gratuite ; les autres attractions étaient payantes (et au prix fort !)

 

          - 2° Par contre, il faut lire "les parcs de Parcs Canada". En effet, tous les parcs nationaux ne sont pas gérés par Parcs Canada. Ainsi, la plupart des parcs du Québec sont gérés par la SÉPAQ (Société des Établissements de Plein Air du Québec). Et ces parcs là n'accordent pas la gratuité en 2017. C'est le cas, par exemple du Parc de Gaspésie, de celui de la Témiscouata (que nous avons vu de loin), de celui de Miguasha (mais il était exceptionnellement gratuit le samedi 9 septembre quand nous y sommes arrivés ; ceci étant, il n'a quasiment aucun intérêt). Nous avons donc dû acquitter la somme de 8,50 dollars canadiens par personne pour le parc national de Gaspésie (environ 5,60 euros/personne/jour). Forte inflation car le péage était de 6,50 dollars en 2013 (2 dollars de plus en 4 ans soit + 30 %)

 

     Quel usage est fait de ce droit d'entrée dans le parc de Gaspésie aussi bien qu'à Forillon en année normale ? On a aménagé des chemins, des points de vue et des parkings pour y accéder.

     En fait,la principale ressource consiste dans l'hébergement avec des campings, hôtels et gîtes : souvent, ce n'est pas donné (un exemple : j'ai cherché un hébergement au hasard pour le début du mois d'octobre dans un chalet 2 places situé dans le parc de Gaspésie : 207 dollars environ TTC soit la modique somme de 140 euros !!!)  mais on est sur place. Autre ressource : les droits de pêche au saumon.

 

     Très bien mais nombre de villes et villages québecois ont créé des réseaux de chemins sans faire payer quoi que ce soit. Plus intéressant encore, les sentiers du Parc régional des Appalaches (situé dans la région Chaudière-Appalaches) sont quasiment tous gratuits ; en particulier celui qui mène au Sugar Loaf d'où on a une vue superbe (voir : http://gerard.fretelliere.over-blog.com/article-chroniques-canadiennes-2-119670093.html)

 

     On a, ici, une conception du parc national différente de ce qu'on rencontre généralement en Europe (il y a des exceptions comme en Lithuanie, Croatie...). Dans notre continent, les parcs nationaux sont des zones protégées, se situent dans des sites exceptionnels, souvent en haute montagne, et l'entrée y est gratuite (parc du Jotunheim en Norvège, parc de la Vanoise en France, parc du Stelvio/Stilfs en Italie...). 

 

     Curieusement, il faut souvent être bon citoyen pour payer le droit d'entrée. En effet, Forillon et le parc de Gaspésie sont traversés par des routes ou pistes ouvertes au trafic de transit. On peut donc traverser en voiture la totalité du parc de Gaspésie et une partie de celui de Forillon sans rencontrer le moindre lieu de perception de droits. Il faut effectuer un détour pour payer son écot mais cela est nécessaire car des gardes circulent ou se placent à l'entrée des chemins pour traquer les contrevenants (une barrière automatique serait plus pertinente). Nous avons eu l'occasion de discuter avec l'un de ces gardes qui nous expliquait que le parc de Gaspésie était autrefois gratuit et qui était assez désabusé en évoquant l'évolution commerciale du lieu.

 

     Pour créer le parc de Forillon, le gouvernement fédéral n'a pas fait dans la dentelle. En effet, considérant que la nature n'est jamais si belle que quand elle est vide, des centaines de familles, qui habitaient sur les terres où a été créé le parc, ont été expulsées brutalement pour faire place nette. Seules restent quelques maisons qui servent de musée en plein air  et les prairies alentour sont fauchées. Ailleurs, un oeil exercé devine parfaitement l'ancienne implantation humaine ; y compris, le long d'une piste,  par la présence à intervalle régulier de pommiers. Hommage dérisoire à la mémoire des expulsés : des panneaux évoquent la vie antérieure et citent les familles.   

 

 

 

Les propriétaires expulsés de l'Anse au Griffon. Il y en a eu d'autres (par exemple à La Grave)

Les propriétaires expulsés de l'Anse au Griffon. Il y en a eu d'autres (par exemple à La Grave)

Les enfants des expulsés racontent la vie d'avant.

Les enfants des expulsés racontent la vie d'avant.

Une ancienne ferme conservée comme attrait touristique.

Une ancienne ferme conservée comme attrait touristique.

     Ces expulsions sont une constante de l'histoire canadienne. Les indigènes parqués dans des réserves ; les Acadiens chassés de leurs terres... L'an dernier, j'avais déjà eu l'occasion de lire des articles sur le déplacement des Acadiens installés sur le territoire du futur parc de Kouchibougac au Nouveau Brunswick (8 villages liquidés). Le parc de Bic a entraîné la disparition des fermes qui y existaient (on a gardé un bâtiment ; c'est une constante !). Virés également les Métis du parc Jasper dans l'Ouest.

 

     L'article ci-dessous évoque avec précision les modalités de l'expulsion et évoque Kouchibouguac :  http://www.lapresse.ca/le-soleil/arts/livres/201508/01/01-4889769-expropriation-de-forillon-45-ans-plus-tard.php

 

     Les "défenseurs de la nature" à Forillon peuvent être contents. S'il n'y a plus d'habitants permanents (hormis le personnel de Parcs Canada et celui gérant les hébergements) on peut avoir la chance de rencontrer des ours et d'autres animaux censés être sauvages (pour notre part, nous avons vu un indolent porc-épic sur un parking). En France, on n'a pas encore osé chasser les habitants pour laisser les animaux sauvages proliférer !!! Et on se demande quel était l'intérêt écologique de la création de Forillon quand on constate que les paysages ne sont pas plus exceptionnels que bien d'autres sites gratuits et qu'il est possible (avec plus ou moins de facilité) de croiser quantité d'animaux sauvages (orignaux, chevreuils, coyotes, putois, porcs-épics, renards, ours...) dans l'arrière-pays de Montmagny.

 

     Dans le parc de Gaspésie, c'est différent. Les paysages sont montagneux (point culminant à plus de 1200 mètres), il n'y avait personne hormis des bûcherons  et on souhaitait préserver le dernier troupeau de caribous (les frères des rennes de l'Eurasie à cette différence près qu'ils n'ont jamais été domestiqués) au sud du Saint Laurent. 

 

     Quelques photos pour conclure : 

Le cap Gaspé dans le parc de Forillon (on devine une baleine !!!)

Le cap Gaspé dans le parc de Forillon (on devine une baleine !!!)

Paysages du parc national de Gaspésie

Paysages du parc national de Gaspésie

Le lac aux Américains dans le parc national de Gaspésie

Le lac aux Américains dans le parc national de Gaspésie

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Présentation

  • : Le blog de Gérard FRETELLIERE
  • : Sabolien depuis plus de 40 ans. Conseiller municipal d'opposition de 1989 à 2008 puis de nouveau de 2016 à 2020. Ancien responsable syndical. Militant associatif (écologie, défense des demandeurs d'emploi, aide à l'intégration des étrangers). Je circule en ville à vélo ou à pied. Géographe de profession, je suis passionné de voyages et de jardinage. J'ai créé ce blog en 2011.
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